Massoud est mort. Vive Massoud !

Ou comment béatifier un criminel de guerre

La situation internationale, principalement en Afghanistan, à fait l'actualité durant de long mois. La lutte contre le terrorisme est devenu une priorité nationale et internationale. Et les peuples "libres" se devaient de libérer les afghan-es, sous le joug du régime fondamentaliste des talibans. Cependant, le trop-plein d'information a permis, une fois n'est pas coutume, de faire passer certaines positions sans aucune réaction de la part des populations occidentales. En effet, dans tout le spectacle médiatique de la guerre d'Afghanistan, très peu ont osé aborder la "coïncidence" de la mort du commandant Massoud, deux jours seulement avant les attentats du 11 septembre qui ont soit-disant bouleversés l'ordre mondiale.

Peut-être peut-il sembler facile d'accuser, sans preuve, et encore une fois, la CIA et le gouvernement américain dans cet assassinat. Pourtant, il suffit de se poser la question "à qui profite le crime ?" pour douter une nouvelle fois de la réalité que veulent faire transparaître les médias.

Le commandant Massoud appartenait au mouvement sunnite fondamentaliste Jamiat-i-islami (société de l'islam, modérée) dirigée par Burhannuddin Rabbani, particulièrement influent parmi les tadjiks, les ouzbeks et les turkmènes du nord de l'Afghanistan.

En 1989, les accords de Genève, signés par l'Afghanistan, l'Union soviétique, les États-Unis et le Pakistan, entraînent le retrait des troupes soviétiques. Cependant, la guerre continue, car les moudjahidins (islamistes aidés par le Pakistan et la CIA) tentent de renverser le pouvoir de Najibullah (pro-soviétique), aidé par la milice de Dostom (ouzbeks). En 1992, Najibullah se retire dans le cadre d'un plan de paix des Nations Unis. Des milices rebelles (anciens alliés du gouvernement), associées aux principaux groupes de moudjahidins non pachtounes (le Jamiat-e Islami; le Hizb-e Wahdat Islami, Parti de l'Unité Islamique, soutenu par les hazaras; et la milice de Dostom) s'emparent alors du pouvoir. Mojaddedi est président de l'état islamique d'Afghanistan pendant deux mois. Suit Rabbani ( Jamiat-e Islami), qui, en décembre 1992, est élu président pour deux ans par une shura (conseil) dominé par les partisans du Jamiat. Celui-ci restera pourtant en fonction jusqu'en 1996, date de la victoire des talibans, et il est toujours président de l'état islamique d'Afghanistan à l'ONU.

Le nouveau régime modifie  les systèmes juridique et social pour les conformer aux interprétations locales du droit musulman (l'Afghanistan n'a jusqu'à présent jamais eu de réelle culture musulmane). Des châtiments tels que l'amputation, la flagellation et la lapidation apparaîssent. Les moudjahidins tortureront et tueront nombre de leurs opposants (dont des membres de l'ancien gouvernement ).

Cependant, des divisions internes au sein de l'alliance apparaissent, et les différents groupes finissent par se battre pour le contrôle de Kaboul, la capitale. Le mouvement fondamentaliste Hezb-e Wahdat Islami demande le départ des milices ayant aidé les soviétiques par le passé (comme la milice de Dostom). La cinquième bataille de Kaboul oppose les troupes gouvernementales soutenues par la Russie, les ouzbeks, Hekmatyar (le premier ministre) poussé par le Pakistan et le Hezb-e Wahdat soutenus par l'Iran. Dostom finira par prendre Kunduz. Bref, un beau bordel de 92 à 96, année de la prise de Kaboul par les talibans. Massoud, pendant ces années, passe pour ce qu'il semble être réellement : un chef militaire comme les autres, qui aura participé au pillage de l'Afghanistan post-soviétique. Autant détesté par les populations que tous les autres chefs moudjahidins de l'époques.

À partir de fin 94 (lors de l'apparition des talibans, qui prennent Kandahar le 5-11), les moudjahidines commencent à s'allier malgré leurs nombreux différents, et les ennemis de Massoud deviennent finalement ses amis (Hekmatyar rejoint le gouvernement le 13-5-96), pour former ce que l'on appelle aujourd'hui l'Alliance du Nord.

Cependant, le monde occidental se réjouit de la prise du pouvoir par les talibans, le 27-9-96. En effet, le pays allait peut-être enfin connaître la paix (et Unlocal allait enfin pouvoir construire son pipe-line). D'ailleurs, le prise de Kaboul a été saluée comme une avancée positive par la secrétaire d'état américaine Madeleine Albright. Pourtant, les talibans regroupes la plupart des moudjahidins déçus par l'insécurité et l'incapacité du régime à instaurer un réel état islamique. Effectivement, depuis leur arrivée, le pays a connu la paix, moyennant beaucoup de sacrifices (un commerçant pouvait tranquillement aller à la mosquée en laissant la garde du commerce à un enfant, puisque de toute façon, tout le monde était obligé d'aller à la mosquée... Sans parler bien sûr des conditions des femmes, finalement peu différentes des femmes saoudiennes !).

Mais les États-Unis et le monde occidental ont eu tôt fait de comprendre que le régime taliban leur était finalement néfaste (ils se sont acoquinés avec la pire des crapules, Ben-Laden, qui 15 ans auparavant était considéré comme un fervent défenseur des libertés du monde occidental contre le régime soviétique, ce dernier étant pourtant le seul ayant laissé un minimum de libertés aux femmes afghanes). Il fallait donc le supprimer, et le remplacer.

Je ne sais pas si la CIA a réellement commandité les attentats du 11 septembre. Certains pensent que oui, d'autres (beaucoup d'autres) pensent que non. Encore une fois, à qui profite le crime ? Mais ce qui est certain, c'est qu'il s'agit de l'élément qui a déclenché la nouvelle guerre d'Afghanistan, et la chute du régime taliban. Or, on peut remarquer que les États-Unis et la "communauté internationale" (les États-Unis tous seuls, donc) ont eut tôt fait de se trouver un allié (et un prétendant au futur gouvernement de Kaboul). Il était tout tracé : il s'agissait de la fameuse Alliance du Nord, qui se battait depuis 96 pour reprendre Kaboul aux talibans.

Mais la chose n'était pas si aisée. L'Alliance du Nord souffrait de son histoire sanglante. Et les choses auraient pu se passer autrement si les État-Unis avaient aidé un criminel comme Massoud, vis-à-vis de l'opinion publique occidental.

Massoud est tué le 9-9-2001 par deux faux journalistes munis d'une caméra piégée.

Les État-Unis avaient tout intêret à (faire) supprimer ce commandant génant avant le début de la guerre. Et on peut d'ailleurs le voir aujourd'hui, Massoud est maintenant considéré comme un héros de la résistance anti-talibans. Voire même comme un martyr. Pourtant, aucune enquête véritable n'a été faite sur sa mort, et on ne sait toujours pas vraiment qui l'a tué (ou fait tué).

Ainsi, les États-Unis ont pu, sans risque, s'allier avec l'Alliance du Nord, qui n'est finalement qu'une coalition entre tous les moudjahidines fondamentalistes entraînés par la CIA dans les années 80 pour la lutte contre le satan soviétique, et coupables de nombreuses exactions sur leurs prisonniers ennemis (milliers de cadavres de talibans découverts en novembre 97 vers Mazar-e Sharif), leurs opposants politiques (persécution des pro-soviétiques à partir de 1992, torture et exécution de personnes supposées soutenir les talibans par les forces sous le commandement de Massoud), et les populations (bombardements aveugles sur des zones d'habitation, des hôpitaux et des mosquées). Mais cela est rarement mentionné dans les médias de masse...

Hélas, bien d'autres hypothèses peuvent être faites (que dire du Pakistan et de ses services secrets ?). Et la lumière ne sera probablement jamais faite. Mais je pense qu'il vaut mieux de simples hypothèses que les histoires prémachées des médias d'aujourd'hui (qui, au final, ne se donnent même pas la peine de fournir une réponse viable à ce genre d'interrogations). Il faut dire aussi que sa mort a été un peu (beaucoup) eclipsée par les attentats du 11 septembre. Ce qui a sûrement évité que beaucoup de gens s'interrogent sur sa mort. Preuve, s'il en est, que ces deux événements sont probablement liés...

dav
4-1-2002


Sources :